L'entreprise utilisatrice (E.U) peut-elle mettre un terme au contrat de travail de l'intérimaire ?
L' E.U peut stopper la mission avant son terme dans 4 cas :
Pendant la période d'essai.
En utilisant la souplesse.
En cas de faute grave de l'intérimaire.
En cas de force majeure.
Est-ce que l'agence de travail temporaire peut rompre le contrat de manière anticipée ?
En dehors de faute grave ou de force majeure, l'entreprise de travail temporaire doit proposer un nouveau contrat à l'intérimaire dans des conditions (rémunération, qualification, durée et horaires de travail...) proches de celui qui a été rompu (Article L 124-5 du code du travail), prenant effet dans un délai maximum de 3 jours ouvrables suivant la rupture.
Si l'ETT n'est pas en mesure de proposer un nouveau contrat dans les mêmes conditions ou si le contrat fait l'objet de modifications, l'agence doit assurer à l'intérimaire une rémunération équivalente y compris lui verser l'indemnité de fin de mission et l'indemnité de congés payés.
Recours abusif ?
Un intérimaire en en mission depuis 6 ans dans la même entreprise utilisatrice travaillait 10 mois sur 12 chaque année. Lors d'un changement de direction, la nouvelle équipe décida de ne plus faire appel à cet intérimaire.
L'intérimaire en vertu des dispositions des articles L1251-40, L1251-5, L1251-6, L1251-7, L1251-10, L1251-11, L1251-12, L1251-30 et L1251-35 a vu son contrat requalifié en CDI depuis le premier jour de la première mission.
Aussi bien l'entreprise utilisatrice que le responsable d'agence qui est légalement responsable pénal aux yeux de la loi se sont retrouvés passibles d'une amende de 3 750 euros et d'un emprisonnement de 6 mois.
Vous vous interrogez sur l'engagement et la persévérance des résultats ?
Nous allons y répondre en 3 étapes
1 - Robert-Vincent JOULE est Professeur des Universités.Il consacre
l’essentiel de ses activités de recherche à la question du changement
des comportements et des mentalités.
En complément une interview de Joule
2 - Comment vous situez-vous dans votre apprentissage ?
Vous vous interrogez sur la manipulation des habitudes ?
Prenez place
Robert-Vincent JOULE
est Professeur des Universités.Il consacre l’essentiel de ses activités
de recherche à la question du changement des comportements et des
mentalités.Pas de complot, de Nouvel Ordre Mondial ou d'Illuminatis dans
cette conférence, juste la démonstration que de simples petites actions
peuvent influencer notre comportement.
Si la vidéo n'apparait pas, nous vous invitons à cliquer sur le lien suivant pour la visionner.
Sans doute vous arrive-t-il fréquemment de vouloir obtenir quelque chose
d'autrui ?
Vous voulez que votre voisin s’occupe de votre chien,, que
vos amis viennent manifester avec vous, etc. Comment vous y prenez-vous
? Vous pouvez convaincre, mais encore faut-il que vous soyez doué pour la
persuasion.
Ces techniques, on les connaît, elles font l'objet, depuis
plusieurs décennies, d'importantes recherches. On en parle peu en
France, probablement par pure pudibonderie, à moins que ce ne soit pour
mieux les réserver aux manipulateurs professionnels.
Robert-Vincent JOULE
est Professeur des Universités.Il consacre l’essentiel de ses activités
de recherche à la question du changement des comportements et des
mentalités.Pas de complot, de Nouvel Ordre Mondial ou d'Illuminatis dans
cette conférence, juste la démonstration que de simples petites actions
peuvent influencer notre comportement.
L'auteur de la video de la conférence de Joule ayant décidé de restreindre sa diffusion, nous vous invitons à cliquer sur le lien suivant afin de la visionner. Désolé pour ce dérangement.
Les TIC (Technologies de l'Information et de la Communication) , une simple histoire de terminologie ?
L'avènement de l'Internet et principalement du Web comme média de masse et le succès des blogs, des wikis ou technologies Peer to Peer confèrent aux TIC une
dimension sociétale. Gérard Ayache dans La Grande confusion,
parle d'« hyperinformation » pour souligner l'impact anthropologique
des nouvelles
technologies. De nombreux internautes, quant à eux, considèrent
l'Internet comme une technologie de la relation (TR) : Joël de Rosnay a
repris cette expression dans La révolte du
pronétariat : des mass média aux média des masses. Le Web 2.0 est permis par les TIC (wikipedia).
Comme elles sont de plus en plus présentes dans la vie quotidienne,
elles interrogent chacun, la question de la surcharge informationnelle
fait débat : Mythe ou Réalité ? L'impact des TIC
sur les conditions de travail est même l'objet de 20 recommandations
de la part du Conseil d'Analyse Stratégique (CAS).
Dans le même temps, les spécialistes de la pédagogie et de
l'enseignement réfléchissent sur leurs impacts. Les TIC deviennent TICE
(E pour enseignement) et les débats débordent sur tous les
terrains : Éducation, Formation et Emploi en prenant de multiples
formes (conférences, webinaires, non conférence ou barcamp,
apérotwitter, Ted ou Clair etc...). Comment s'y retrouver ? Quand les TIC et les TICE font leur STAR, Code 7H99 part en Réflexion !
STAR avec un S comme Situation
LES TIC reposent sur des serveurs, du matériel informatique, des
télécommunications, des réseaux informatiques, du multimédia, des
logiciels et permettent notamment le développement du commerce
électronique.
L'informatisation du travail fait de chacun de nous des éternels
débutants à chaque évolution ou à chaque changement d'entreprise. Entre
celles qui travaillent avec un environnement MAC,
Microsoft, ou Open source, le salarié est amené à d'abord devoir
s'adapter à cet environnement pour le faire sien avant de pouvoir
réaliser les tâches qui lui sont confiées. Sans compter tous les
flux d'informations qu'il doit maîtriser pour répondre à la demande
"en juste à temps". Certaines sociétés préconisent les mails, les
tchats, les réunions, les visio-conférences, les
web-conférences, etc...tout en surveillant les différents
indicateurs de productivité, de performance,...et les demandes de X et
de Y. Ce travail qui n'est pas référencé dans les fiches de poste,
qui pourrait s'appeler le travail caché, fait que les 35 heures du
contrat de travail ou le forfait de travail jour des cadres semblent
bien courts et amènent certains à calculer ou à demander un
temps de repos minimum entre deux journées de labeur pour éviter un
burn-out programmé.
Toutes ces situations où le salarié doit s'adapter en permanence
peuvent être considérées comme une source de stress face à l'injonction
de performance quotidienne soit pour conserver son emploi,
soit pour évoluer dans sa carrière professionnelle.
De ce constat, le Conseil d'Analyse Stratégique a des préconisations
d'une naïveté qui nous laissent sans voix dans son axe numéro 1 pour
développer la maîtrise des usages des TIC par les
entreprises et considérer le système d'information comme un outil
d'aide au travail des salariés.
Considérer le système d'information comme un outil d'aide au travail du salarié
Promouvoir et développer des méthodes d'analyse des usages du système d'information en entreprise
Établir un bilan annuel des usages des TIC dans l'entreprise
Développer des dispositifs ciblés d'évaluation des usages des TIC à l'intention des entreprises
Développer des dispositifs de régulation interne des usages des TIC dans l'entreprise
Certains mettent en accusation le management, mais ce dernier ne
fait que tenter d'harmoniser l'ensemble de ces outils avec plus ou moins
de tact. Il ne fait que réfléchir à de nouvelles
solutions potentielles en faisant une comparaison avec les solutions
déjà mises en place. Éventuellement, il apporte des propositions et
analyses de solution potentielle au lieu d'améliorer sa
compréhension de la situation. L'habitude des solutions par analogie
l'empêche de concevoir autrement. Or, les technologies sont de moins en
moins incrémentales mais de rupture.
STAR avec un T comme Tâches
Anaïs Saint-Jude (@anaisaintjude), fondatrice et responsable du programme BiblioTech de la
bibliothèque de Stanford. Elle était sur la scène de Lift 2012 pour mettre en perspective la question de la surcharge informationnelle, l’un des
maux qu’on attribue aux nouvelles technologies. Mais est-ce si sûr ?
"La surcharge d’information fait partie de la condition humaine :
nous sommes confrontés par trop de possibilité, trop de complexité”.
Ce sentiment de surcharge exprime autrement notre
insatiable curiosité et notre besoin d’innovation, estime Anaïs
Saint-Jude. Le sentiment de surcharge d’information a été
particulièrement documenté entre le XVe et le XVIIe siècle. Une époque
qui ressemble par certains côtés beaucoup à la nôtre, estime Anaïs
Saint-Jude. “C’était une époque de changements, de grandes
découvertes, où l’on a à la fois redécouvert les textes anciens
et été confronté à une double révolution technologique : celle de la
presse et de la poste. C’est une époque où l’information s’est
démultipliée. Et il est donc intéressant de regarder comment
les gens de cette époque ont géré cet afflux d’information”.
“Bien sûr, nous sommes aujourd’hui plus interconnectés, bien
sûr, il y a une accélération de l’information… Mais peut-on vraiment
dire qu’il y a “plus” de surcharge informationnelle qu’avant
?” questionne Anaïs Saint-Jude. Enfin, il faudrait aussi
regarder combien notre vie peut également être facilitée par ces
surcharges. Elles n’ont pas que des aspects négatifs. Elles nous
permettent aussi d’accéder à de l’information, communiquer,
échanger, nous coordonner… “Chaque génération réagit différemment à
la surcharge. Descartes expliquait qu’il fallait se fier à son
bon sens. D’autres ont opté pour la simplicité. Chacun s’adapte
différemment à cette complexité. Personne n’a jamais lu tous les livres.
De tout temps on a tourné plusieurs pages à la fois.”
Le CAS dans son deuxième axe de recommandations pour intégrer systématiquement les utilisateurs et DRH dans la définition des besoins
et la conduite des projets en associant les représentants du
personnel à leur conception et pilotage fait peu cas du travail des
chercheurs en la matière.
6 - Intégrer pleinement les utilisateurs de TIC dans les projets
7 - Systématiser la participation des DRH dans la conduite de projet SI à tous les stades de développement
8 - Développer les compétences des DRH en matière d'analyse des usages
9 - Améliorer l'information des représentants du personnel sur les
conséquences sociales d'une évolution importante du système
d'information
10 - Renforcer les capacités des IRP pour qu'elles saisissent mieux
les enjeux humains des sujets TIC/SI, en particulier en ce qui concerne
les conditions de travail.
C'est croire que les communautés de connaissances et de pratiques
peuvent être viables sans les communautés d'élaboration des
connaissances et de recherche.
STAR avec A comme Action
Chaque responsable d’application prend conscience et accepte que
l’outil qu’il propose ne convient pas, en l’état, à l’ensemble des
utilisateurs. La conduite du changement et les formations
aideront sans doute à comprendre l’outil mais ne le rendra pas
nécessairement naturel d’utilisation pour tous, et cela n’a rien à voir
avec de la mauvaise volonté ou de la résistance au
changement.
En cela l'axe 3 des recommandations du CAS est encore surprenant
11- Renforcer l'effort des entreprises en matière de formation continue dans les TIC
12 - Établir un bilan quantitatif et qualitatif de l'accompagnement
du changement dans les entreprises afin d'identifier des axes d'effort
pour développer cette activité.
13 - Ne pas stigmatiser les emplois "hypo-technologique" dans les entreprises.
STAR avec un R comme Résultat
"Il est urgent de reconnaitre que les collaborateurs disposent d’un
génie qui leur est propre et qui leur permet de s’adapter à leur
environnement pour réussir.Les outils devraient toujours
servir à démultiplier l’efficacité des utilisateurs et non les
asservir." JA Gourret
Daniel Goleman, auteur du best-seller Emotionnal Intelligence a
apporté un nouvel éclairage sur cette question et bien d'autres. Notre
intelligence cérébrale et notre acuité émotionnelle forment
un subtil mélange qui se renforce mutuellement. Entre la conscience
et le contrôle de soi, la motivation et l'empathie, l'ouverture
d'esprit, le tact et la diplomatie, c'est une autre façon
d'être bon ou meilleur. Le marché du travail l'a déjà intégré comme
un facteur clé de la réussite.
Plus créatif, plus productif, plus flexible et plus convivial,
tels sont les mots d'ordre pour devenir propriétaire de sa vie.
La peur, l'anxiété, l'irritabilité ou la déprime et leurs
conséquences : problèmes familiaux, conflits de travail, toxicomanie,
alcoolisme, ... sont autant d'indicateurs à prendre en
considération pour agir et surmonter les difficultés.
Les formations destinées au Top management, middle management ont
connu les brain ou Team builiding, il est temps de passer au Heart
Building.
Le développement et l'expression de l'intelligence sont intimement
liés aux facteurs émotionnels comme le rappelle le psychologue Michel
Trudeau.
Nombreuses sont déjà les personnes qui ont conscience que seul le QI
ne permet pas d'assurer un succès personnel et professionnel. Weschler
l'avait déjà mis en évidence en 1940. Ces travaux
développés par Tooby en 1985, Oatley & Jonson-Laird en 1987 et
Damasio en 1994 reprécisaient que les émotions favorisent l'adaptation
d'une personne à son environnement. Cela sera vulgarisé
en 1995 avec les recherches de Goleman.
Comment rendre la réussite accessible à tous ?
L'intelligence émotionnelle vise à fournir un cadre scientifique à
l'idée que les personnes diffèrent dans la manière dont ils identifient,
utilisent, comprennent et régulent leurs émotions.
L'intelligence émotionnelle est une habileté et un trait de
personnalité qui permet un bien-être, une maitrise de soi, des
compétences émotionnelles et sociales. C'est également une source
d'information qui ne peut être ignorée même si elle ne change rien à
une situation mais à contrario elle peut empêcher d'agir de manière
appropriée en faisant interpréter faussement une situation
et nous transformer en bovins qui ruminent.
Prendre conscience de ses émotions permet d'identifier, de
communiquer et de les réguler pour mieux faire baisser notre stress et
quitter un cercle vicieux. Ainsi, en décodant le message véhiculé
par nos émotions, nous pouvons déterminer si l'émotion est
appropriée au contexte. De là, nous pouvons développer une stratégie
appropriée.
Aussi bien dans la formation initiale (éducation) que dans la
formation continue (tout au long de la vie), les émotions vécues par les
élèves ou les apprenants ne tombent plus dans les pièges
culturels classiques. Des enseignants aux formateurs, les émotions
deviennent une composante de l'apprentissage.
Pour répondre à la soif d'apprentissage et de connaissances, il est
important de prendre en considération les différentes formes
d'intelligences des individus (spatiale, musicale, linguistique,
kinesthésique, interpersonnelle, intra-personnelle et
logico-mathématique).
La prise en compte de ce nouveau paradigme de l'intelligence est un
facteur de réussite scolaire et professionnelle. Il accentue, notamment,
l'auto-motivation et la persévérance face aux défis
quotidiens.
Le plaisir des performances ou les joies de l'apprentissage ? La réussite vie devient un long fleuve émotionnel.
En 1997, Csikszentmihalyi précise les conditions et impacts d'une
plus grande fluidité émotionnelle avec nos capacités individuelles à
mettre nos émotions au service de la performance et de la
créativité.
Être ici et le faire maintenant au lieu de tenter de motiver sur une
utilité à moyen ou long terme permet de développer un climat favorable
qui stimule l'intérêt des participants. Qu'une tache
soit trop facile ou trop difficile fait émerger ennui ou anxiété.
Les interruptions régulières ou permanentes ou une surcharge
d'activité peuvent créer des barrages où les émotions viendront alors
parasiter les capacités d'analyse de notre cerveau.
L'échec scolaire devient une réalité identique aussi bien pour les
plus intelligents que pour les moins intelligents même si les ressorts
sont différents.
Le web, les réseaux sociaux permettent cette autonomie dans
l'apprentissage. J'apprends quand je veux, où je veux avec qui je veux.
De plus l'apprentissage informatique permet d'individualiser
les parcours en fonction de l'intelligence du participant.
Les intuitions de Jung, Piaget, Rogers ou Adorno sont confirmées par les développements des neurosciences.
Le mardi 1er mars 2011, s'est tenue, sous la Coupole, en présence de
M. Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et de
la Vie associative, une séance solennelle
inter-académique présidée par M. Gabriel de Broglie, chancelier de
l'Institut, sur le thème : Les nouveaux défis de l'éducation.
“Avant d'enseigner quoi que ce soit à
qui que ce soit, au moins faut-il le connaître. Qui se présente,
aujourd'hui, à l'école, au collège, au lycée, à l'université ?
Ce nouvel écolier, cette jeune étudiante n'a jamais vu veau, vache,
cochon ni couvée. En 1900, la majorité des humains, sur la planète,
travaillaient au labour et à la pâture ; en 2011, la
France, comme les pays analogues, ne compte plus qu'un pour cent de
paysans. Sans doute faut-il voir là une des plus fortes ruptures de
l'histoire, depuis le néolithique. Jadis référée aux
pratiques géorgiques, la culture, soudain, changea. Celle ou celui
que je vous présente ne vit plus en compagnie des vivants, n'habite plus
la même Terre, n'a plus le même rapport au monde. Elle
ou il n'admire qu'une nature arcadienne, celle du loisir ou du
tourisme.
- Il habite la ville. Ses prédécesseurs immédiats, pour plus de la
moitié, hantaient les champs. Mais, devenu sensible à l'environnement,
il polluera moins, prudent et respectueux, que nous
autres, adultes inconscients et narcisses. Il n'a plus la même vie
physique, ni le même monde en nombre, la démographie ayant soudain bondi
vers sept milliards d'humains ; il habite un monde
plein.
- Son espérance de vie va vers quatre-vingts ans. Le jour de leur
mariage, ses arrière-grands-parents s'étaient juré fidélité pour une
décennie à peine. Qu'il et elle envisagent de vivre
ensemble, vont-ils jurer de même pour soixante-cinq ans ? Leurs
parents héritèrent vers la trentaine, ils attendront la vieillesse pour
recevoir ce legs. Ils ne connaissent plus les mêmes âges,
ni le même mariage ni la même transmission de biens. Partant pour la
guerre, fleur au fusil, leurs parents offraient à la patrie une
espérance de vie brève ; y courront-ils, de même, avec, devant
eux, la promesse de six décennies ?
- Depuis soixante ans, intervalle unique dans notre histoire, il et
elle n'ont jamais connu de guerre, ni bientôt leurs dirigeants ni leurs
enseignants. Bénéficiant d ‘une médecine enfin efficace
et, en pharmacie, d'antalgiques et d'anesthésiques, ils ont moins
souffert, statistiquement parlant, que leurs prédécesseurs. Ont-ils eu
faim ? Or, religieuse ou laïque, toute morale se résumait
en des exercices destinés à supporter une douleur inévitable et
quotidienne : maladies, famine, cruauté du monde. Ils n'ont plus le même
corps ni la même conduite ; aucun adulte ne sut leur
inspirer une morale adaptée.
- Alors que leurs parents furent conçus à l'aveuglette, leur
naissance est programmée. Comme, pour le premier enfant, l'âge moyen de
la mère a progressé de dix à quinze ans, les parents d'élèves
ont changé de génération. Pour plus de la moitié, ces parents ont
divorcé. Ils n'ont plus la même généalogie.
- Alors que leurs prédécesseurs se réunissaient dans des classes ou
des amphis homogènes culturellement, ils étudient au sein d'un collectif
où se côtoient désormais plusieurs religions, langues,
provenances et mœurs. Pour eux et leurs enseignants, le
multiculturalisme est de règle. Pendant combien de temps pourront-ils
encore chanter l'ignoble "sang impur" de quelque étranger ? Ils n'ont
plus le même monde mondial, ils n'ont plus le même monde humain.
Mais autour d'eux, les filles et les fils d'immigrés, venus de pays
moins riches, ont vécu des expériences vitales inverses.
Bilan temporaire. Quelle littérature, quelle histoire
comprendront-ils, heureux, sans avoir vécu la rusticité, les bêtes
domestiques, la moisson d'été, dix conflits, cimetières, blessés,
affamés,
patrie, drapeau sanglant, monuments aux morts, sans avoir
expérimenté dans la souffrance, l'urgence vitale d'une morale ?
VOILÀ POUR LE CORPS ; VOICI POUR LA CONNAISSANCE
- Leurs ancêtres fondaient leur culture sur un horizon temporel de
quelques milliers d'années, ornées par l'Antiquité gréco-latine, la
Bible juive, quelques tablettes cunéiformes, une préhistoire
courte. Milliardaire désormais, leur horizon temporel remonte à la
barrière de Planck, passe par l'accrétion de la planète, l'évolution des
espèces, une paléo-anthropologie millionnaire.
N'habitant plus le même temps, ils vivent une toute autre histoire.
- Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont
méticuleusement détruit leur faculté d'attention en réduisant la durée
des images à sept secondes et le temps des réponses aux
questions à quinze secondes, chiffres officiels ; dont le mot le
plus répété est "mort" et l'image la plus représentée celle de cadavres.
Dès l'âge de douze ans, ces adultes-là les forcèrent à
voir plus de vingt mille meurtres.
- Ils sont formatés par la publicité ; comment peut-on leur
apprendre que le mot relais, en français s'écrit "- ais", alors qu'il
est affiché dans toutes les gares "- ay" ? Comment peut-on leur
apprendre le système métrique, quand, le plus bêtement du monde, la
SNCF leur fourgue des "s'miles" ?
Nous, adultes, avons doublé notre société du spectacle d'une société
pédagogique dont la concurrence écrasante, vaniteusement inculte,
éclipse l'école et l'université. Pour le temps d'écoute et
de vision, la séduction et l'importance, les médias se sont saisis
depuis longtemps de la fonction d'enseignement.
Critiqués, méprisés, vilipendés, puisque pauvres et discrets, même
s'ils détiennent le record mondial des prix Nobel récents et des
médailles Fields par rapport au nombre de la population, nos
enseignants sont devenus les moins entendus de ces instituteurs
dominants, riches et bruyants.
Ces enfants habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives
montrent que l'usage de la toile, lecture ou écriture au pouce des
messages, consultation de Wikipedia ou de Facebook, n'excitent pas
les mêmes neurones ni les mêmes zones corticales que l'usage du
livre, de l'ardoise ou du cahier. Ils peuvent manipuler plusieurs
informations à la fois.
Ils ne connaissent ni n'intègrent ni ne synthétisent comme nous, leurs ascendants. Ils n'ont plus la même tête.
- Par téléphone cellulaire, ils accèdent à toutes personnes ; par
GPS, en tous lieux ; par la toile, à tout le savoir ; ils hantent donc
un espace topologique de voisinages, alors que nous
habitions un espace métrique, référé par des distances. Ils
n'habitent plus le même espace.
Sans que nous nous en apercevions, un nouvel humain est né, pendant
un intervalle bref, celui qui nous sépare des années soixante-dix. Il ou
elle n'a plus le même corps, la même espérance de vie,
ne communique plus de la même façon, ne perçoit plus le même monde,
ne vit plus dans la même nature, n'habite plus le même espace. Né sous
péridurale et de naissance programmée, ne redoute plus,
sous soins palliatifs, la même mort. N'ayant plus la même tête que
celle de ses parents, il ou elle connaît autrement.
- Il ou elle écrit autrement. Pour l'observer, avec admiration,
envoyer, plus rapidement que je ne saurai jamais le faire de mes doigts
gourds, envoyer, dis-je, des SMS avec les deux pouces, je
les ai baptisés, avec la plus grande tendresse que puisse exprimer
un grand-père, Petite Poucette et Petit Poucet. Voilà leur nom, plus joli que le vieux mot, pseudo-savant, de dactylo.
- Ils ne parlent plus la même langue. Depuis Richelieu, l'Académie
française publie, à peu près tous les vingt ans, pour référence, le
dictionnaire de la nôtre. Aux siècles précédents, la
différence entre deux publications s'établissait autour de quatre à
cinq mille mots, chiffres à peu près constants ; entre la précédente et
la prochaine, elle sera d'environ trente mille. A ce
rythme, on peut deviner qu'assez vite, nos successeurs pourraient se
trouver, demain, aussi séparés de notre langue que nous le sommes,
aujourd'hui, de l'ancien français pratiqué par Chrétien de Troyes
ou Joinville. Ce gradient donne une indication quasi photographique des
changements que je décris. Cette immense
différence, qui touche toutes les langues, tient, en partie, à la
rupture entre les métiers des années récentes et ceux d'aujourd'hui.
Petite Poucette et son ami ne s'évertueront plus aux mêmes
travaux. La langue a changé, le labeur a muté.
L'INDIVIDU
Mieux encore, les voilà devenus tous deux des individus. Inventé par
saint Paul, au début de notre ère, l'individu vient de naître ces
jours-ci. De jadis jusqu'à naguère, nous vivions
d'appartenances : français, catholiques, juifs, protestants, athées,
gascons ou picards, femmes ou mâles, indigents ou fortunés… nous
appartenions à des régions, des religions, des cultures,
rurales ou urbaines, des équipes, des communes, un sexe, un patois,
la Patrie. Par voyages, images, Toile et guerres abominables, ces
collectifs ont à peu près tous explosé.
Ceux qui restent s'effilochent. L'individu ne sait plus vivre en
couple, il divorce ; ne sait plus se tenir en classe, il bouge et
bavarde ; ne prie plus en paroisse ; l'été dernier, nos
footballeurs n'ont pas su faire équipe ; nos politiques savent-ils
encore construire un parti plausible ou un gouvernement stable ?
On dit
partout mortes les idéologies ; ce sont les
appartenances qu'elles recrutaient qui s'évanouissent.
Cet nouveau-né individu, voilà plutôt une bonne nouvelle. A balancer
les inconvénients de ce que l'on appelle égoïsme par rapport aux crimes
commis par et pour la libido d'appartenance – des
centaines de millions de morts –, j'aime d'amour ces jeunes gens.
Cela dit, reste à inventer de nouveaux liens. En témoigne le
recrutement de Facebook, quasi équipotent à la population du monde.
Comme un atome sans valence, Petite Poucette est toute nue. Nous,
adultes, n'avons inventé aucun lien social nouveau. L'entreprise
généralisée du soupçon et de la critique contribua plutôt à les
détruire.
Rarissimes dans l'histoire, ces transformations, que j'appelle
hominescentes, créent, au milieu de notre temps et de nos groupes, une
crevasse si large et si évidente que peu de regards l'ont
mesurée à sa taille, comparable à celles visibles au néolithique, à
l'aurore de la science grecque, au début de l'ère chrétienne, à la fin
du Moyen Age et à la Renaissance.
Sur la lèvre aval de cette faille, voici des jeunes gens auxquels
nous prétendons dispenser de l'enseignement, au sein de cadres datant
d'un âge qu'ils ne reconnaissent plus : bâtiments, cours de
récréation, salles de classes, amphithéâtres, campus, bibliothèques,
laboratoires, savoirs même… cadres datant, dis-je, d'un âge et adaptés à
une ère où les hommes et le monde étaient ce qu'ils
ne sont plus.
Trois questions, par exemple : que transmettre ? A qui le transmettre ? Comment le transmettre ?
QUE TRANSMETTRE ? LE SAVOIR !
Jadis et naguère, le savoir avait pour support le corps du savant,
aède ou griot. Une bibliothèque vivante… voilà le corps enseignant du
pédagogue. Peu à peu, le savoir s'objectiva : d'abord dans
des rouleaux, sur des velins ou parchemins, support d'écriture ;
puis, dès la Renaissance, dans les livres de papier, supports
d'imprimerie ; enfin, aujourd'hui, sur la toile, support de messages
et d'information. L'évolution historique du couple support-message
est une bonne variable de la fonction d'enseignement. Du coup, la pédagogie changea au moins trois fois : avec
l'écriture, les Grecs inventèrent la Paideia ; à la suite de l'imprimerie, les traités de pédagogie pullulèrent. Aujourd'hui ?
Je répète. Que transmettre ? Le savoir ? Le voilà, partout sur
la Toile, disponible, objectivé. Le transmettre à tous ? Désormais, tout
le savoir est accessible à tous. Comment le transmettre
? Voilà, c'est fait. Avec l'accès aux personnes, par le
téléphone cellulaire, avec l'accès en tous lieux, par le GPS, l'accès au
savoir est désormais ouvert. D'une certaine manière, il
est toujours et partout déjà transmis. Objectivé, certes, mais, de plus, distribué. Non concentré.
Nous vivions dans un espace métrique, dis-je, référé à des centres, à
des concentrations. Une école, une classe, un campus, un
amphi, voilà des concentrations de personnes, étudiants et
professeurs, de livres en bibliothèques, d'instruments dans les
laboratoires… ce savoir, ces références, ces textes, ces dictionnaires…
les voilà distribués partout et, en particulier, chez vous – même
les observatoires ! mieux, en tous les lieux où vous vous déplacez ; de
là étant, vous pouvez toucher vos collègues, vos élèves,
où qu'ils passent ; ils vous répondent aisément. L'ancien espace des
concentrations – celui-là même où je parle et où vous m'écoutez, que
faisons-nous ici ? – se dilue, se répand ; nous vivons,
je viens de le dire, dans un espace de voisinages immédiats, mais,
de plus, distributif. Je pourrais vous parler de chez moi ou d'ailleurs,
et vous m'entendriez ailleurs ou chez vous, que
faisons-nous donc ici ?
Ne dites surtout pas que l'élève manque des fonctions cognitives qui
permettent d'assimiler le savoir ainsi distribué, puisque, justement,
ces fonctions se transforment avec le support et par
lui. Par l'écriture et l'imprimerie, la mémoire, par exemple, muta
au point que Montaigne voulut une tête bien faite plutôt qu'une tête
bien pleine. Cette tête vient de muter encore une fois. De
même donc que la pédagogie fut inventée (paideia) par les
Grecs, au moment de l'invention et de la propagation de l'écriture ; de
même qu'elle se transforma quand émergea l'imprimerie, à
la Renaissance ; de même, la pédagogie change totalement avec les
nouvelles technologies. Et, je le répète, elles ne sont qu'une variable
quelconque parmi la dizaine ou la vingtaine que j'ai
citée ou pourrais énumérer.
Ce changement si décisif de l'enseignement – changement répercuté
sur l'espace entier de la société mondiale et l'ensemble de ses
institutions désuètes, changement qui ne touche pas, et de loin,
l'enseignement seulement, mais aussi le travail, les entreprises, la
santé, le droit et la politique, bref, l'ensemble de nos institutions –
nous sentons en avoir un besoin urgent, mais nous en
sommes encore loin.
Probablement, parce que ceux qui traînent, dans la transition entre
les derniers états, n'ont pas encore pris leur retraite, alors qu'ils
diligentent les réformes, selon des modèles depuis
longtemps effacés. Enseignant pendant un demi-siècle sous à peu près
toutes les latitudes du monde, où cette crevasse s'ouvre aussi
largement que dans mon propre pays, j'ai subi, j'ai souffert
ces réformes-là comme des emplâtres sur des jambes de bois, des
rapetassages ; or les emplâtres endommagent le tibia, même artificiel :
les rapetassages déchirent encore plus le tissu qu'ils
cherchent à consolider.
Oui, depuis quelques décennies je vois que nous vivons une période
comparable à l'aurore de la Paideia, après que les Grecs apprirent à
écrire et démontrer ; semblable à la Renaissance qui vit
naître l'impression et le règne du livre apparaître ; période
incomparable pourtant, puisqu'en même temps que ces techniques mutent,
le corps se métamorphose, changent la naissance et la mort, la
souffrance et la guérison, les métiers, l'espace, l'habitat,
l'être-au-monde.
Face à ces mutations, sans doute convient-il d'inventer
d'inimaginables nouveautés, hors les cadres désuets qui formatent encore
nos conduites, nos médias, nos projets adaptés à la société du
spectacle. Je vois nos institutions luire d'un éclat semblable à
celui des constellations dont les astronomes nous apprirent qu'elles
étaient mortes depuis longtemps déjà.
Pourquoi ces nouveautés ne sont-elles point advenues ? Je crains
d'en accuser les philosophes, dont je suis, gens qui ont pour métier
d'anticiper le savoir et les pratiques à venir, et qui ont,
ce me semble, failli à leur tâche. Engagés dans la politique au jour
le jour, ils n'entendirent pas venir le contemporain. Si j'avais eu à
croquer le portrait des adultes, dont je suis, ce profil
eût été moins flatteur.
Je voudrais avoir dix-huit ans, l'âge de Petite Poucette et de Petit
Poucet, puisque tout est à refaire, puisque tout reste à inventer. Je
souhaite que la vie me laisse assez de temps pour y
travailler encore, en compagnie de ces Petits, auxquels j'ai voué ma
vie, parce que je les ai toujours respectueusement aimés.