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9 mars 2020

#LLDDF : La dernière leçon d'Universalisme offerte à Rokhaya Diallo et Caroline Fourest.

 Rokhaya Diallo et Caroline Fourest étaient deux essayistes françaises sur les thèmes du féminisme et de la lutte contre les discriminations. C'est-à-dire qu'elles essayaient grâce à leurs qualités littéraires de développer des argumentaires, soit de juger, d'examiner, de peser en fonction de leurs connaissances philosophiques et des résultats d'études scientifiques qui étaient concordants avec leur intime conviction, leur ressenti et les témoignages qu'elles recevaient.

L'une comme l'autre avaient leurs aficionados, elles savaient chacune à leur manière défendre leur point de vue par une excellente maîtrise de la rhétorique. Si Caroline Fourest se revendiquait être une militante du féminisme universaliste et Rokhaya Diallo, une féministe intersectionnelle, il fallait déjà s'arrêter sur ce premier postulat pour comprendre leurs erreurs.

Le féminisme ne pouvait être un Universalisme, puisque l'Universalisme se caractérisait par le fait de considérer les humains indépendamment, entre autre, de leur sexe. L'Universalisme renvoyait aux droits de l'Homme, c'est-à-dire de l'espèce humaine. Il était composé comme un corpus, un corps sans sexe dont tous les êtres humains étaient titulaires. L'universalisme s'opposait donc à la critique relativiste consistant à créer une différence entre droit des hommes et celui des femmes. Le féminisme ne se préoccupant que du droit des femmes sans celui des hommes et des enfants, il ne pouvait être considéré comme un Universalisme, il s'agissait déjà d'un identitarisme comme l'avaient été les lois raciales en France, les lois antisémites, les lois homophobes et transphobes et les lois misogynes et misandres.

Le Nouvel Obs publiait une vidéo avec Rokhaya  Diallo et Caroline Fourest sur l'opposition Féminisme Universalisme Vs Féminisme Intersectionnel :


Le procédé mettait en exergue ce qu'on appelle en rhétorique un faux dilemme faisant croire à une pluralité interprétative alors que l'artificialisation d'une dichotomie interne n'amenait qu'à propager une pensée unique et à faire oublier que le Féminisme n'était dans sa forme actuelle qu'un identitarisme.


Les deux essayistes étaient connues pour les polémiques qu'elles lançaient aussi bien avec leurs différents livres qu'avec leur communication sur les réseaux sociaux ou dans les journaux. Et chacune était connue pour son radicalisme sur certains sujets en niant toute étude scientifique du réel, en réfutant les résultats des méta-analyses, en défendant leur point de vue à partir de leur identité réduite et limitée à la religion et à la couleur de peau pour Rokhaya Diallo et à la sexualité et à la couleur de peau pour Caroline Fourest. Chacune voyait le monde à partir de ces deux critères oubliant qu'elles étaient, d'abord des êtres humains, censées être capables de comprendre la biologie, la physique, la relation à autrui, la psychologie ou la morale comme n'importe quel autre être humain qu'il soit homme, femme, intersexe, blanc, noir, homosexuel, hétérosexuel, avec ou sans croyance religieuse, etc..., soit indépendamment de ses particularismes. Le manichéisme dont elles faisaient preuve nuisait à l'émancipation de tous, réduisait les débats à de fausses alternatives tout en limitant la réalité et rendant incapable leur auditoire respectif de saisir la complexité humaine sur tous leurs sujets de prédilection.

Même si Rokhaya Diallo bénéficiait de l'avantage d'avoir été élevée, instruite et éduquée par deux visions culturelles distinctes contrairement à Caroline Fourest qui n'avait connu qu'une seule vision du monde durant son enfance et son adolescence, c'est-à-dire que Rokhaya Diallo avait grandi dans l'interstice de deux cultures, de deux langues, elle avait pu développer un esprit de traduction entre deux mondes, ce qui d'après les études sur les enfants bilingues permettait de développer plus de compétences qu'un enfant monolingue, le peu de place accordé à son expérience la poussait dans une forme de radicalisation qui la rendait tout autant éloignée de l'Universalisme que Caroline Fourest.

A s'exprimer depuis leurs particularismes, elles s'enfermaient chacune à leur manière dans leur identitarisme au détriment de leur militance pour des droits de l'Homme effectifs et d'une meilleure lutte contre les discriminations en vigueur en France.

Le faux dilemme induit par la vidéo du Nouvel Obs faisait qu'elles participaient toutes deux à la propagation de l'idée d'un choc des civilisations, la thèse défendue par Huntington pourtant déjà mise à mal par Said avec ses ouvrages Orientalism et Des intellectuels et du Pouvoir où il expliquait les fictions que sont les concepts d'Occident et d'Orient qui permettent de mieux ne rien dire d'intéressant et de pertinent sur les expressions suprémacistes comme « races inférieures, Orientaux, Aryens, Nègres » et autres. Et malgré les travaux de l'historien indien Sanjay Subrahmanyam montrant, à son tour, que les rhétoriques accusatrices ne sont que mensonges, les cultures étant imbriquées, leur parcours hybridés et trop dépendants des uns et des autres pour que l'on puisse les séparer de manière radicale en blocs distincts par des cloisons étanches.

A titre d'exemple, puisqu'il était coutumier dans les faux débats actuels de distinguer le féminisme universaliste du féminisme intersectionnel, de distinguer l'Occident et l'Orient, quand au 8e siècle lors de la conquête dite Arabe qui a crée un espace dit Musulman allant de Cordoue à Bagdad, les lieux de pensée n'étaient pas limités par un espace géographique étatique, le mouvement des idées n'était pas cloisonné. Quand les musulmans découvrent la pensée des Grecs, qualifiée comme berceau de la démocratie occidentale, qu'ils la traduisent, la commentent pour au final la réactualiser, ils vont la transmettre aux universités dites européennes. Cette transmission notamment par Averroès, dont chacun à l'époque du Moyen-Age se demandait s'il fallait dire Averroès l'andalou ou Averroès le latin,  n'était pas un simple transfert mais une synthèse et une production dont les intellectuels européens avec l'essor de l'imprimerie s'étaient emparés et avaient re-débattus. Le dialogue était réciproque. Derrière la différence artificielle des civilisations dans lesquelles chacun était encastré, emmuré, les échanges intellectuels d'alors répondaient aux paradigmes cognitifs de l'être humain non réduit à un particularisme. Une universalité de la traduction mise à mal aujourd'hui par la sacralisation des cultures qui n'avaient jamais été des espaces étanches et n'avaient jamais été dans une dynamique d'impossible conciliation.

Les doctrinaires de la race avaient pu penser avoir raison grâce aux sciences de la biologie jusqu'à ce que les Sciences dans leur obligation de vérification démontrent que contrairement aux autres animaux, il n'existait plus plusieurs races humaines mais une seule, l'Homo Sapiens, les néandertaliens et les denisoviens ayant disparu. Si la sociologie tentait de réaffirmer la notion raciale comme les suprémacistes en leur temps, elle était encore démontée par la recherche scientifique permettant aujourd'hui de montrer comment ces identités étaient des productions historiques datables que les nations étaient des fictions naturalisantes. Même si chacunes, Rokhaya Diallo comme Caroline Fourest étaient intimement convaincues qu'il y avait un discours occidental d'un côté et une œuvre de résistance se nommant parfois lutte contre l'impérialisme de l'autre pour faire reconnaître les histoires marginalisées, réprimées ou oubliées. C'était oublier qu'aucune nation n'était homogène et serait faite de natifs et d'émigrés. 
Le conflit israélo-palestinien l'illustrait à merveille, il y avait une diversité des points de vue autant chez les israéliens que chez les palestiniens. Il ne s'agissait pas de deux blocs homogènes. Chacun était traversé par des divergences peu importe son particularisme, qu'il soit religieux, ethnique ou lié à l'orientation sexuelle de part et d'autre. Les débats sur ce qu'était l'identité judéo-israélienne ou musulmano-palestinienne étaient intenses chez tous les intellectuels de tous bords. Tout était dynamique et en réflexion. Et ces débats oubliaient les questions de l'identité israélienne et palestinienne avec la montée de l'athéisme de chaque côté de la frontière.
Tous les pays du monde étaient constitués d'autochtones et de populations importées, chaque pays était une mosaïque et la France pouvait s'enorgueillir, malgré son passé de puissance coloniale avec les traumatismes que cela avait induit de part et d'autres avec ses lois discriminantes à une époque, d'être en ce début du 21e siècle le pays d'Europe comptant  les communautés de juifs, de maghrébins, de musulmans, d'asiatiques et de roms les plus importantes. 

Et pourtant ce n'était pas une nouveauté, chez les Grecs de l'Antiquité comme chez les Arabo-musulmans des conquêtes, Le patriotisme culturel l'emportait déjà sur le patriotisme racial : « Nous appelons grecs, disait déjà Isocrate, non seulement ceux qui sont de notre sang, mais encore ceux qui se conforment à nos usages ». Tous les empires étaient fondés universellement sur la réunion de population diverses religieusement comme ethniquement. Elles cohabitaient ensemble en fonction de lois parfois religieuses avec les statuts de dhimmi, des millet et parfois étatiques comme le statut des juifs ou des homosexuels en France. 
Quand l'ethno-nationalisme se développait dans une région du monde cela faisait émerger des pogroms divers. Cet ethno-nationalisme avait besoin de faux dilemmes et de bouc-émissaires pour croître, pour diviser et réduire chacun à des particularismes identitaires, faisant d'une partie de la population des étrangers, réactivant ainsi la xénophobie et quand cette mécanique ethno-nationaliste ou nationaliste religieux s'emballait, elle conduisait à des crises sacrificielles comme les génocides des arméniens, des juifs, des roms, des homosexuels, des hutus et tutsis, des apostats, etc...

Le féminisme Intersectionnel ou Universaliste de Rokhaya Diallo et Caroline Fourest était des passéismes, des conservatismes basés sur d'anciennes appartenances ne faisant plus sens, n'ayant plus de réalité. Leurs théories identitaires étaient des erreurs sanglantes amenant à des identités carcérales qui ne pouvaient produire que de l'exclusion, de la violence et des discriminations.

Le féminisme universaliste se voulait être une obligation de respecter les autres puisque par principe il voulait les considérer comme égaux. Ainsi, il éliminait la moindre curiosité et la reconnaissance de l'altérité. La particularité de l'autre était sacrifiée sur l'autel du féminisme universaliste en offrande.
De même, le féminisme intersectionnel avec la primauté à la différence, l'exigence de reconnaissance de l'altérité enfermait dans le relativisme des points de vue en affirmant une incomparabilité des perspectives et tout en gommant et en invisibilisant le commun déjà partagé. Il participait à la même illusion des ethno-nationalistes à croire en des parois étanches entre les individus, les cultures, les pays quand ils n'avaient fait que se mélanger depuis la nuit des temps. 
Et le repli identitaire induit par la recréation des diaspora supranationales documentées notamment par Maboula  Soumahoro avec son livre LeTriangle et l'Hexagone commettait la même impasse ne serait-ce qu'en oubliant qu'un hexagone était une somme de triangles, elle participait à cette même chimère en faisant croire que les noirs vivraient dans une nation déterritorialisée en France et dans un espace-temps sans existence, puisqu'en vivant dans un autre pays aux règles différentes de leur pays d'origine en raison de leur couleur de peau automatiquement liée à l'Afrique, ils n'étaient pas au fait des évolutions de leur pays d'origine ni de leur pays d'accueil, ils n'avaient plus de perspectives d'avenir dans l'un et l'autre territoire, ils devenaient des étrangers au monde et ce partout sur Terre. Ils devenaient des fantômes de leur lieu de résidence et d'existence. Ils étaient réduits comme au temps de l'esclavage à des êtres de nature noire distincts des autres et non des Êtres de Culture identiques à tous les êtres humains.

En ce monde du 21e siècle où les flux de population, de capitaux, de marchandises et d'informations faisaient que le Monde n'avait jamais été autant unifié tout en célébrant ces différences, où le pluralisme d'interprétation comme du temps des Lumières était toujours fêté, et que les débats et les conclusions sur les Droits de l'Humain depuis la création de l'ONU avaient déjà été menés. Si seulement Rokhaya Diallo et Caroline Fourest prenaient le temps de s'instruire au lieu de se conforter dans leurs illusions, de créer des faux débats sur des droits qui seraient distincts entre les hommes et les femmes tout en oubliant celui des enfants qui ont le droit à l'accès à leur origine au lieu d'un droit confisqué par des demandes et exigences égoïstes de femmes et d'hommes.

Peut-être, serait-il temps de passer aux Droits de la Nature car sans écosystème viable, il n'y avait plus d'existence humaine pour tous. Si les conflits étaient inhérents à l'histoire de l'Humain, la construction du monde imposait une éthique universaliste et une politique sans faiblesse de reconnaissance du pluralisme et cela valait autant pour une lesbienne blanche promouvant  PMA et GPA  en exterminant les droits de l'Enfant qu'une musulmane noire défendant l'archaïsme ségrégationniste du voile islamique.

Bien sur une place de choix serait proposée à Rokhaya Diallo et Caroline Fourest dans un Musée de la Femme où les visions identitaires considérées comme immuables au nom d'une volonté politico-religieuse seraient abordées, proposées par leurs seules communautés afin que le public hétérogène puisse découvrir pleinement leur vision réductrice de la culture et du monde. Par l'attribution d'espaces dédiés, chacun pourrait contempler leur dialogue figé pour l'éternité entre deux représentantes des femmes. La science trop universaliste, trop émancipatrice serait présentée comme une croyance dans ce Musée Féminin. 
Ainsi, les générations futures seraient vaccinées du féminisme, de cet identitarisme passéiste qu'il ait été blanc ou noir, occidental ou oriental, européen ou africain, ce faux dilemme chéri par les identitaires Rokhaya Diallo et Caroline Fourest.

Les épisodes précédents :
https://code7h99.blogspot.com/2020/01/la-lapidation-du-dernier-francais.html

https://code7h99.blogspot.com/2020/01/la-lapidation-du-dernier-francais_12.html

https://code7h99.blogspot.com/2020/01/la-lapidation-du-dernier-francais-des.html

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https://code7h99.blogspot.com/2020/01/la-lapidation-du-dernier-francais-de.html 

https://code7h99.blogspot.com/2020/02/la-lapidation-du-dernier-francais-la.html
https://code7h99.blogspot.com/2020/02/la-lapidation-du-dernier-francais-des.html


https://code7h99.blogspot.com/2020/03/llddf-8-mars-2020-journee-du-droit-de.html

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