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2 avr. 2020

#LLDDF : Covid-19 et l'enfant bleu



Depuis Hans Asperger, rien n'avait changé. Si la première définition officielle de l'autisme avait été élaborée par Léo Kanner en 1943 où trois traits caractéristiques devaient être identifiés pour poser le diagnostique d'autisme comme le désir de solitude, l'aspiration à l'absence de changement et l'anormalité du langage, il mettait également en exergue des problèmes relationnels entre l'enfant autiste et les parents. Quand Bruno Bettelheim rédige La forteresse vide en 1967, l'intrication de la psychanalyse est à son maximum, les enfants devaient être éloignés de leur famille considérée comme pathogène et être accueillis au sein de structures psychiatriques. Il faudra attendre le début du 21e siècle, en 2010 pour une remise en cause de cette approche psychanalytique notamment par des associations de parents et l'enfant autiste sera considéré comme ayant des troubles envahissants du développement, l'expression spectre autistique se répand au sein du monde médical et populaire.

De la vision de l'autrichien travaillant pour le régime nazi préconisant l'extermination des déficients mentaux à l'exception des Asperger pour leur utilité à la mise à l'écart dans des structures psychiatriques, l'autiste était toujours un sujet socio-politique exclu du monde commun. Pour le chercheur Franck Ramus, directeur de recherche au CNRS en sciences cognitives, les autistes pouvaient être le fer de lance d'une refondation des traitements psychiatriques avec une analyse critique de la psychanalyse et de ses arguments d'autorité, de créer un nouveau manifeste pour une psychiatrie et une psychologie basées sur des preuves scientifiques. Les autistes notamment Asperger avaient beau expliquer qu'ils ne souhaitaient pas être rééduqués, ni devoir renormaliser leurs comportements, les psychiatres et psychologues notamment constructivistes issus de l'école Palo Alto et des travaux de Bateson exigeaient d'imposer des méthodes comportementalistes sur les autistes indépendamment de toute éthique. Ils étaient dans le même travers que les psychanalystes accusant les mères d'être responsables de l'autisme, ils se basaient sur leurs croyances illusoires pour rendre l'autre conforme à leur vision du monde.

Quand la femme du Président de la République Française, Brigitte Macron décida que l'autisme et les autistes devaient être mieux considérés, il s'agissait avant tout de mieux prendre en charge les seuls autistes Asperger, de les démarquer encore des autres autistes et du reste de la population. Il serait dommage que la société ne bénéficie pas de leur intelligence, ne profite pas de leur valeur ajoutée. Ainsi, sous couvert de cette fausse bienveillance répandue dans les mouvements féministes français, il était demandé d'être bienveillant avec les Asperger, d'adopter un comportement différent, de les traiter différemment, et donc de continuer à les stigmatiser encore plus. Ils étaient intelligents, ils avaient droit au respect de l'autre. Peu importe si les autres autistes étaient toujours maltraités dans les institutions psychiatriques françaises, seuls compter les Asperger comme au temps des nazis.

Il fallait voir sur Twitter pendant cette période de confinement qui n'avait rien d'exceptionnelle pour les autistes toujours emmurés dans leur monde, les messages suite à la journée des enfants bleus. Une injonction à la bienveillance qui serait remplacée le lendemain par une autre injonction envers d'autres populations qui n'étaient pas conformes à la majorité. 
Cette même société française dont la devise était l'égalité s'était perdue dans les chemins de la raison. D'une égalité des droits, la France exigeait que tous les français soient identiques, des clones où les handicapés, les déficients mentaux ou intellectuels devaient être montrés du doigt, se montrer en qualité de différents des autres pour avoir droit à de la bienveillance, être respectés, finalement être traités autrement que les autres. 
L'absurdité et le paradoxe français dans toute sa splendeur. L'enfant bleu n'était plus un humain avec ses spécificités mais un autre différent des autres, un neuro-atypique qui ne pouvait plus avoir de commun avec les autres. Sa ressemblance, ses points communs avec l''humanité n'étaient plus envisagés, son particularisme faisait que la société l'excluait du monde commun, il était bleu, à traiter avec bienveillance, à suivre des programmes comportementaux de rééducation comme dans des camps chinois sous Mao. Tel était l'état de l'humanisme en France en cette journée dédiée aux enfants bleus.

Même s'il existait de nombreux travaux sur la qualité de vie quant à la place à accorder à la subjectivité des personnes concernées, sur comment appréhender le bien-être en fonction des âges, des contextes de la vie qu'ils soient médicaux, thérapeutiques, institutionnels, professionnels, ... , la littérature sur l'autisme était essentiellement issue des universités en sociologie et en philosophie avec tous leurs biais et croyances diverses qui participaient, in fine, à refuser  autant le réel des autistes que d'accepter la diversité et l'altérité sans raison médicale.

Si l'empathie, en sa qualité de compréhension des sentiments, des intentions et cognitions d'autrui,  était une expérience décisive dans les interactions quotidiennes de tout à chacun, ses usages sociaux différenciés notamment à l'égard des Autistes et plus particulièrement des Asperger en cette journée de l'enfant bleu posait le problème moral induit par l'écart entre l'immédiateté d'un partage affectif désiré et la volonté d'y associer un contrôle interactionnel asymétrique des sentiments et de l'empathie, elle-même. 
Ainsi, une invisibilisation sociale et individuelle était la conséquence de cette journée de réification, de chosification des personnes autistes dans toute leur diversité avec cet oubli, voire ce déni que cette volonté de contrôle de l'empathie générait mépris et souffrance sociale par une dépossession et déshumanisation d'autrui qui participaient à leur tour à neutraliser l'expérience affective de chacun sur sa propre expérience de l'altérité en lui ordonnant de développer non pas des comportements adaptés en fonction des situations rencontrées mais un comportement normatif à la personne peu importe la situation du moment.

Entre un citadin affairé acceptant de laisser mourir un SDF sur les trottoirs en période de confinement ou pas, un responsable d'entreprise utilisant ses employés comme du personnel corvéable et jetable à merci et un politique décidant de décorer d'une légion d'honneur ou de faire bénéficier d'équipements de protection individuelle le seul personnel médical et non tous les personnels de l'agriculture à la logistique, de la sécurité au travail administratif, ... , indispensables eux-aussi au bien-être d'une société confinée, ils montraient tous que la société française, en période de crise, était toujours à classer la population entre des individus indispensables et méritants d'un côté, et les autres périssables et responsables de leur mort, à faire que les projections empathiques entraîneraient toujours de l'indifférence, produiraient inévitablement de la souffrance et de la distance sociale entre les individus avec des droits différenciés, soit le contraire de la devise française et par là-même sa périclitation comme aucun idéal n'était possible avec une telle différence de traitement, avec une telle déconsidération de l'autre. 

Sans une articulation entre l'histoire singulière et collective, la désaffiliation et la désacculturation étaient les seuls effets produits avec une impossibilité de développer les capacité de penser l'autre et ses idées, d'adhérer au groupe, à la communauté et mouvements divers qui faisaient la France. Cette intentionnalité spécifique de cette journée bleue ne participait qu'à déposséder chacun de ses ressources empathiques, à créer des bourreaux et des victimes. 

Quand 2 + 2 = 4, le reste suivait, chaque être dit bleu le savait mais pour la société des gouvernants 2 + 2 = 5 rien ne pouvait évoluer, rien ne pouvait être construit durablement, tout ne pouvait que s'écrouler tel un château de cartes quand un enfant se voulant Président de la Guerre car il avait ses petits poings serrés face au réel au nom de la bienveillance pour les siens et non de tous les français dans toute leur altérité, dans toute leur magnifique diversité.

Il n'existait pas de parents héroïques dotés de compétences et les autres, ce binarisme entretenu par la femme du Président de la République Française faisait que cette responsabilité transférée aux seuls parents dans leur volonté de faire évoluer l'enfant bleu dans un milieu ordinaire faisait l'impasse sur les définitions de la langue française de l'autonomie et de l'indépendance. La professeure de français Brigitte Macron ignorait la différence entre capacité à faire et capacité à décider, entre indépendance et autonomie. Sans une pluralité de direction, il ne pouvait exister une autonomie pragmatique où les parents comme les enfants auraient des choix, auraient comme tout à chacun un horizon des possibles mais ils leur étaient imposer, sans le dire, en étant hypocrite ou ignorant par le subterfuge de cette pseudo bienveillance d'orienter les parents vers un horizon normatif indéfini, et sans les doter des moyens indispensables à une réussite quelconque, de faire porter aux seuls parents la responsabilité des échecs tout en s'auréolant d'une empathie illusoire.


Les épisodes précédents :

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